Aller vers un autre monde possible
Merci à Jean-Michel Coulomb pour cette contribution aux (F)Estives 2011 de l’objection de croissance
Réflexions sur la stratégie envisagée à partir d’un point de vue médiatique
Note liminaire : cette contribution s’inscrit dans le cadre d’un débat sur le rapport au Politique. Comme une des causes de ce débat est un malaise ressenti par certains sur la question de l’impact du mouvement altermondialiste sur la société (il y aurait « panne de stratégie »), cette contribution aborde ce débat d’un « point de vue médiatique » : l’objet de l’action politique (au sens noble du terme) étant en premier lieu d’amener le plus de monde possible à la volonté et à l’action de faire bifurquer la société, l’existence ou la constitution d’un « milieu ou médium sociétal » favorable pour faire passer cette action politique est un pré-requis essentiel à considérer. Dans cette contribution, la problématique « médiatique » n’est donc pas restreinte à celle de la production et du contrôle des supports (papier, audio, vidéo, etc.) mais est appréhendée dans un sens beaucoup plus large : l’organisation et la structuration des rapports sociétaux[1] en tant que vecteurs déterminants pour le passage et l’émergence des idées et pratiques de transformation sociétale (dans le sens de la confortation de l’ordre établi ou au contraire de son dépassement).
Quelles donc sont les « conditions médiatiques » actuelles ? Le rapport au Politique peut-il y apporter quelque chose ? Comment œuvrer à leur transformation ?
I – Les conditions de la Lutte dans la « post-modernité »
S’il est assez clair que la texture économique du capital a profondément changé en son stade du néo-libéralisme[2], il importe de revenir sur les très profonds changements intervenus dans le fonctionnement sociétal car ceux-ci sont aussi très déterminants sur la force d’impact de transformation sociale de tel ou tel axe d’action, donc sur la stratégie à mettre en œuvre pour aller vers « un autre monde possible » évitant à l’humanité l’installation d’une sorte de « meilleur des mondes ».
A la serpe. Alors qu’il fut un temps, symboliquement avant la télévision, où la majeure partie de la vie d’un individu, dans ses différents aspects – habitat, travail, loisir (s’il y en avait) – se passait quasi exclusivement dans le cadre d’une classe sociale en soi (la problématique de transformation sociale était alors de faire évoluer la classe porteuse d’émancipation de l’« en-soi » au « pour-soi »), l’écran pour tous et partout (dorénavant jusque dans les cafés !), une véritable 4ème dimension de l’imaginaire, a bouleversé l’ordre ancien et les modalités du contrôle social par les classes dominantes. Progressivement, cette société de l’écran est parvenue à réduire l’importance des « bouillons de culture » propres des groupes sociaux[3] et a réussi à drainer les individus ainsi tendanciellement « a-classifiés » derrière ses médias. Tendanciellement : à une architecture sociale constituée de blocs sociaux susceptibles de s’affronter, affrontement que, pour la classe dirigeante, il s’agissait si possible de prévenir en préservant ses intérêts et par défaut dont il s’agissait de sortir militairement victorieux, s’est ainsi progressivement substituée une architecture sociale constituée de microstructures fédérées autour d’une colonne vertébrale en vidéo. Un type de média particulièrement apte – tel le joueur de flute des frères Grimm, en apparence enchanteur mais en réalité hypnotiseur, emmenant les enfants hors du village d’Hamelin – à détourner les attentions, à capter les énergies et à ainsi passer les « mots d’ordre » de l’oligarchie régnante en termes de consommation, d’émotions à ressentir, de sujets de conversation à avoir, voire de votes à accomplir (ce dernier aspect n’étant pas le plus important). Cette « dictature médiatique » qui ne se limite donc pas au JT (seul, son effet serait à terme soumis à un phénomène d’usure) mais met en œuvre et s’appuie sur un véritable programme de dépolitisation et d’aliénation structurelles, à travers notamment le tittytainment[4] et les grandes messes rituelles du sport, a ainsi largement réussi, en concomitance avec le phénomène des « tribus »[5], à détruire les milieux sociétaux ou médias autoréférentiels que le mode de vie architecturé en classes sociales ou en (macro) groupes sociaux constituait de fait.
S’il n’y a pas, à partir de ce constat, à cultiver un pessimisme résigné, il convient toutefois de reconnaître une certaine impasse stratégique à ne rien changer en se contentant par ailleurs et pour l’essentiel de caler l’action altermondialiste sur l’agenda dicté par l’adversaire, une modalité d’action politique certes utile mais, dans ce conditionnement des esprits et des vies, condamnée à rester en deçà de la masse critique nécessaire pour espérer provoquer une réelle bifurcation. Il convient notamment de reconnaître que la reconstruction d’une « conscience politique » de large échelle – pré-requis pourtant indispensable pour avancer vers « un autre monde possible » – par le vecteur de l’éducation populaire[6] ne peut effectivement guère espérer, dans ces conditions de lutte médiatiquement défavorables en l’état actuel des choses, aboutir par ses seules vertus.
Comment faire pour (re) construire un contexte médiatiquement favorable ?
II – Une tentation erronée
Devant cet état des choses, ressenti avec plus ou moins de netteté, est avancée une proposition, périodique mais présentement aiguillonnée par la montée de l’extrême droite en France, de reconsidérer le rapport de la société civile progressiste au Politique[7].
L’évolution envisagée du rapport au Politique (qui s’appuie aujourd’hui sur l’argument du contrôle démocratique des élus) consisterait grosso modo à aller dans le sens d’un regroupement des forces de la société civile progressiste et du Politique (concept de « parti-mouvement »), à tout le moins d’une forte atténuation de la démarcation organisationnelle entre ces deux mondes.
Alors que c’est justement sur cette démarcation que s’est jusqu’ici fondée la construction altermondialiste, il n’est pas inutile de consulter la pratique et l’Histoire récentes : ce qui en réalité marche avec le Politique, c’est l’action commune sur un thème précis, d’ailleurs plutôt sur le mode de la résistance au sens premier du terme[8], lequel pousse à l’unité, que sur celui de la proposition et/ou de la mise en œuvre d’alternatives à gérer à un niveau global. Dés que les problématiques de programme et de candidatures aux élections interviennent, la division (aiguillonnée par les positions de pouvoir à conquérir) s’installe. L’échec suit. Rappelons-nous le formidable succès des comités du Non … jusqu’au 29 mai (une résistance sur quelque chose de précis : le refus du TCE) et le fiasco qui s’en est ensuivi, une fois que ces comités ont basculé dans la problématique de la participation à l’élection de 2007[9]. Repartir sur un schéma du même ordre à l’issue de la mobilisation contre la « contre-réforme » sarkoziste des retraites – effectuée aussi essentiellement sur ce mode de la résistance tel que précisé ci-dessus – tel que l’induisait le projet de « carrefours de la transformation sociale et écologique » proposé par la Fondation Copernic n’aurait pas ainsi été particulièrement judicieux.
Face à l’illusion que pour refaçonner/réformer un Politique défaillant (du point de vue d’un « autre monde possible »), il faudrait que la société civile s’en saisisse en remplacement ou prenne une participation dans ce rôle, il convient aussi de rappeler, en prenant l’Histoire par l’autre bout, qu’il y a environ cent cinquante ans, l’aile partidaire du mouvement ouvrier n’est pas tombée de la lune mais est elle-même issue du mouvement social et de ses luttes, en a été une émergence puis pour finir une cristallisation (surplombante et directive). Inutile d’épiloguer longuement sur les dérives social-démocrate et communiste (chacune à sa façon se retournant contre le peuple). Un Politique qui prend sa source dans la société civile (plus précisément dans le mouvement social) n’est pas une nouveauté et n’est manifestement pas gage d’un « autre monde possible » dés lors qu’on considère les mêmes causes profondes qui sans cesse surdéterminent cette trame dérivante : logique gestionnaire de l’Institutionnel[10] qui empêche d’entrevoir tout le possible auquel aspire « les masses », insertion progressive et inévitable des élus dans la société et le mode de vie des « gens d’en face », affirmation des volontés de pouvoir[11]. Pour résultat : l’intégration en/dans la classe politique avec ses avantages matériels, ses intérêts psychologiques, ses modes d’être et de pensée. Et, at last but not least, l’affaiblissement de la société civile progressiste amputée de nombre de ses « cadres naturels » aspirés par le Politique[12] : l’énergie, cela peut se transformer et se déplacer mais cela ne peut se dupliquer. Ce sont ces considérants qui fondent (il n’y a pas ici de mot plus juste) la nécessité de l’autonomie de la société civile par rapport au Politique.
Il n’y a pas de raccourci possible : si une réelle et durable transformation sociétale est possible, elle ne peut reposer que sur la colonne vertébrale de l’activité progressiste de la société civile dans une autonomie préservée[13], ce aussi bien dans le temps du bousculement du monde néolibéral actuel que dans le temps du faire vivre de « l’autre monde possible »[14]. Seuls les rapports de force établis sur le terrain et dans les consciences permettent de peser réellement sur le Politique, de l’ « asservir » (dans le sens cybernétique du terme) c’est-à-dire de le faire servir, et non de le servir, dans la mesure du besoin de légiférer[15]. La vraie possibilité de contrôle citoyen des élus est là et non dans une quelconque architecture miracle qui permettrait de s’affranchir des termes de la corruption[16] [17] du pouvoir énoncés ci-dessus[18].
III – Amener les alternatives locales jusqu’à une masse critique
Toute architecture de confusion du Politique et de la société civile progressiste, corollairement à la dérive stratégique de moyen et long termes dont elle est inéluctablement porteuse, déboucherait dans le cours terme sur une politicienne et chaotique foire d’empoigne (encore une fois, voir l’Histoire récente) peu propice à l’éducation populaire. Du point de vue de la problématique médiatique envisagée dans cette contribution – se donner les « moyens médiatiques » d’amener le plus de monde possible sur un véritable projet de bifurcation -, tout nouvel élément pour donner un écho de large ampleur aux propositions de transformation sociale, sociétale et écologique ne peut dés lors être recherché que du coté de l’activité propre de la société civile progressiste.
Comme constaté dans la première partie de ce papier, à notre époque, caler l’action altermondialiste sur la temporalité imposée par l’agenda adverse ne peut être suffisant sans rien changer par ailleurs. Dans leur propre temporalité, les alternatives locales de l’économie sociale et solidaire, celles allant dans le sens de la transition écologique, les circuits courts d’approvisionnement, les nouveaux « commons » et leurs pratiques associées, tels les systèmes d’échange locaux, les partages de savoir, les logiciels libérés de la marchandisation, l’habitat participatif, et de façon plus générale toutes les mises en œuvre hic et nunc d’alternatives sur le terrain, … sans oublier bien sûr celles des médias citoyens et participatifs, sont en fait doublement stratégiques : en tant qu’éléments en soi d’un projet de société alternative mais aussi, du point de vue médiatique adopté dans cette contribution, en tant que producteurs d’un milieu (ou médium) alternatif passeur de valeurs et de pratiques nouvelles. Comme l’atteste l’Histoire, un « nouvel ordre sociétal » ne peut vraiment émerger que si, dans le monde à dépasser, se développent (bien sûr à partir d’ilots dans un premier temps) de nouvelles formes de développement, plus généralement de nouveaux modes de rapports entre les citoyens, de nouvelles formes de vie en commun. En l’occurrence, outre donc la fonction d’alternative économique et écologique en soi portée par ces alternatives locales[19], plus il y aura de monde à y participer concrètement, plus de monde y passera du temps, moins le détournement d’attention et la captation d’énergie évoqués dans la première partie de cette contribution pourront opérer. Face au « système médiatique unique » (distillant pensée et surtout mode d’être uniques), pourra ainsi se dresser un système médiatique alternatif et autoréférentiel[20] s’appuyant pour l’essentiel sur les nouveaux liens entre personnes qui s’y établiront, sur les activités qui s’y dérouleront, sur la nouvelle culture qui en émergera.
De par justement ces qualités médiatiques, le développement des alternatives locales serait un puissant démultiplicateur d’écho des deux autres termes de la topologie des mouvements sociaux et de la société civile progressiste, à savoir d’une part les mouvements de résistance et de solidarité, d’autre part les mouvements d’éducation populaire et les think tank.
La prise en masse critique des alternatives locales passe par leur mise en visibilité les unes vis-à-vis des autres – apports réciproques en termes d’« énergie combattante » et de participation[21], émergence de projets hybridés et/ou plus complexes – ainsi que par leur mise en visibilité sur la place publique. Créer pour ces mises en visibilité des espaces (a priori pérennes) d’échange et d’incubation serait fort utile. Le projet, issu de l’assemblée de convergence pour l’action intitulée « Articuler localement processus du Forum Social et développement des alternatives » qui s’est tenue à Dakar dans le cadre du FSM, d’une semaine internationale en 2012 (positionnement calendaire à confirmer) de forums sociaux locaux axés sur les alternatives locales s’inscrit dans cet objectif (Cf. http://openfsm.net/projects/fs-al/fsal-fr).
Plus généralement, plus il y aura d’initiatives œuvrant à la mise en action de la société civile progressiste dans sa pluralité (multitudes), plus celle-ci se constituera … et se vivra – aspect tout aussi décisif dans la construction du rapport de forces vis-à-vis de l’oligarchie dominante – en sujet de l’émancipation.
En résumé
L’évolution des sociétés, avec le développement sous le contrôle de l’oligarchie dominante des technologies de communication, a eu tendance à réduire les médias autoréférentiels que constituaient les classes sociales et a de ce fait rendu plus complexes la problématique de l’action politique en faveur d’un « autre monde possible ». Pour des raisons attestées par l’Histoire et qui relèvent de causes très profondes renvoyant jusqu’aux volontés de pouvoir, la solution n’est pas dans le raccourci d’une remise en cause de l’architecture de l’altermondialisme basée sur l’autonomie de la société civile, mais au contraire de la cultiver en poussant à son auto-activité hic et nunc. Si cette auto-activité, qui relève de l’exercice le plus poussé de la démocratie, parvient à atteindre une masse critique, cette société alternative en action constituera un nouveau milieu ou médium alternatif propice à faire passer dans les esprits et les pratiques les analyses et propositions des autres mouvements présents dans l’altermondialisme, ceux relevant de la résistance et de la solidarité, ceux relevant des think tank et de l’éducation populaire. Les rapports de force alors institués permettront d’imposer les législations requises notamment par l’action des mouvements relevant de l’éducation populaire.
Jean Michel Coulomb (animateur du réseau F-FSL, membre du CA Attac France)
[1] Rapports sociétaux qui bien sûr s’appuient sur des technologies.
[2] Il s’agit bien d’un stade du capitalisme et non d’une simple superstructure de politiques mises en œuvre (stade, qu’il y a donc, d’un point de vue communicationnel, intérêt à nommer comme tel puisque correspondant aux vécus imposés aux populations.
[3] Bien entendu certaines tendances lourdes de l’évolution du travail ont aussi poussé dans cette direction (augmentation de la productivité requérant des concentrations moindres et surtout toujours plus mouvantes de salariés, intellectualisation du travail vectorisant une « aliénation consentie », télématisation créant de nouveaux modes d’existence et de pensée, etc.).
[4] « Tittytainment » : mot inventé, à bon escient cynique, par l’ancien conseiller de Carter, Brzezinski, par contraction de « tits » (« seins » en argot états-unien) et « entertainment » (« divertissement ») : effectivement tout un programme !
[5] Permis par le temps libre, ce phénomène n’est cependant pas nécessairement critiquable en soi (au reste les réseaux sociaux et la problématique internet peuvent y être rattachés).
[6] Laquelle a d’ailleurs dans la pratique logiquement tendance à s’adosser à cet agenda médiatisé (répondre aux mesures et projets néolibéraux).
[7] Le Politique étant défini comme l’ensemble du monde partidaire et de l’Institutionnel.
[8] Le sens premier de « résistance » c’est de s’opposer à une force préexistante, en l’occurrence à un existant en place ou à un projet néolibéral (plus généralement à un projet relevant d’une forme de domination).
[9] On ne regrettera jamais assez – les fenêtres historiques ne se présentent pas si souvent que cela ! – que ces comités n’aient pas poursuivi sur le thème de l’Europe en embrayant sur la proposition d’une assemblée constituante européenne. Espérons que le mouvement des « Indignés » parvienne à s’en ressaisir.
[10] Terme qui porte en lui-même sa dose de conservatisme.
[11] Alors que l’Amérique du Sud est souvent citée en référence du point de vue de la pertinence du « parti-mouvement », il n’est pas inutile (même s’il ne saurait être question de soutenir le délire furieux qui ferait du Venezuela une dictature) de noter que dans le réel les choses sont parfois bien « compliquées », avec des politiques discutables (notamment extractivistes), parfois une certaine criminalisation des mouvements sociaux, par exemple les entraves à l’activité du MST, une loi interdisant de critiquer le gouvernement en Equateur, l’interdiction de recevoir des fonds étrangers au Venezuela, etc..
[12] Sur cet aspect particulièrement important : combien de structures de lutte n’avons pas vu capoter suite à cette aspiration de ceux/celles qui en étaient les moteurs ?
[13] Bien entendu l’autonomie de la société civile n’exclue aucunement la présence à titre individuel de militants de partis dans ses associations et plus généralement ses organisations : autant de passerelles permettant d’infuser « naturellement » les différents partis de ses analyses et propositions.
[14] L’autonomie de la société civile ne relève donc nullement d’une mise de la tête dans le sable mais d’une architecture de la transformation sociale dûment réfléchie (et dont la paternité, à l’époque moderne, semble revenir au « sous-commandant » Marcos et au mouvement zapatiste, de fait à l’origine de l’altermondialisme, plutôt qu’à la Charte d’Amiens souvent invoquée mais spécifique du mouvement syndical et dont la culture a été ultérieurement étouffée par la IIIème internationale).
[15] Plutôt que la classique dichotomie « pouvoir versus contre-pouvoir », la dichotomie « société civile progressiste versus Institutionnel » est d’ailleurs probablement plus opérante puisqu’un rapport de force instauré par la société civile progressiste lui donne, dans le réel (au-delà du formel), le pouvoir d’imposer sa volonté à l’Institutionnel.
[16] Ce terme de « corruption » dépasse donc de loin la simple acception du langage courant, celle induite par l’intérêt matériel (prévarication) quand bien même cet aspect en fait bien sûr aussi partie (ce qui ne veut pas dire que tous les élus, notamment au niveau du local, y succombent nécessairement).
[17] De façon générale, ce ne sont pas les parcours singuliers qui sont en cause mais leur résultat statistique, en l’occurrence l’intégration en/dans la classe politique.
[18] Peut-on cependant envisager un espace de communication des positions de la société civile progressiste au Politique et même de contrôle du Politique sur ses engagements ? L’autonomie de la société civile progressiste étant préservée, notamment dans ses phases d’élaboration, rien ne l’interdit si cela peut permettre d’améliorer le rapport de force en faveur de l’avancée vers « un autre monde possible ». Le Pacte citoyen lancé par la LDH est ce point de vue tout à fait approprié et va dans le sens de la résolution sur les alternatives adoptée lors de notre dernière AG. Dans cette compréhension des choses, une conjecture à trois phases peut être envisagée : une première phase où les mouvements sociaux sont trop faibles pour vraiment imposer une telle structure au Politique, une seconde où cela s’avère possible et une troisième … où cela ne sert plus à grand chose, l’auto-activité de la société civile progressiste imprimant « naturellement » sa marque à l’évolution sociétale. Dans la mesure de la validité de ce phasage, est-on vraiment sûr aujourd’hui d’être dans une telle seconde phase ?
[19] Il n’est nullement prétendu ici que ces alternatives locales soient l’unique élément sur lequel doive s’appuyer une stratégie altermondialiste. Un autre volet relève de propositions d’organisation de la cité à promouvoir à partir des niveaux plus globaux (qui produiront d’ailleurs des déclinaisons locales).
[20] Cette caractéristique d’autoréférence s’oppose à celle du système médiatique imposé par l’oligarchie dominante qui relève essentiellement de la transcendance imposée (objectifs poursuivis, sujets imposés pour ne pas dire matraqués, solutions suggérées basées sur l’idéologie du renoncement).
[21] Du fait qu’elles s’appuient sur les mêmes valeurs, participer à une alternative n’est bien sûr pas exclusif mais au contraire incitatif à participer à une alternative d’un autre type.
A toutes fins utiles
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Marseille le 03/01/2013
Une utopie réalisable
(Réflexions d’un citoyen du monde sur l’essentiel)
Le communisme ne marche pas, le capitalisme ne marche plus.
Proposons une troisième voie : pacifiquement et sans précipitation.
On l’étudie maintenant pour un début d’application dans 40 à 50 ans…….
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Où sommes nous ?
Nous évoluons sur une planète privilégiée perdue dans un univers hostile, fait de roches, de gaz de particules, et soumis à des températures extrêmes.
Cet univers a-t-il été conçu ou non par un dieu « créateur » ?, Personne ne peut apporter à ce sujet de réponse pertinente. Le problème religieux doit donc se cantonner au niveau de la conscience individuelle et non collective.
La vie a envahi la terre ; trois règnes s’y côtoient : l’animal, le végétal, et le minéral.
Mais au cours de ces deux derniers siècles, un animal : l’homme, a pris le contrôle de l’ensemble, or, visiblement la situation lui échappe, et il ne sait comment gérer cette planète dont il s’est arrogé la propriété
Nos problèmes
Une trop rapide augmentation de la population, multipliée par sept en deux siècles, appelait de profondes transformations sociales, mentales, économiques environnementales et d’infrastructures sans communes mesures avec les moyens disponibles et les politiques suivies durant la même période.
En même temps que le nombre de bras augmente les besoins en main d’œuvre diminuent, du fait de la mécanisation, de la robotisation et de la course à la productivité.
Une fraction non négligeable de la population, ne dispose pas de moyens d’existence décents, tandis qu’une infime minorité accumule des richesses de façon démesurée.
L’homme, excelle dans les sciences, et la production, mais il est totalement dépassé aux plans : politique, économique et même philosophique.
L’environnement se dégrade, les ressources s’épuisent.
Arrêtons là le constat, et donnons-nous comme objectif d’imaginer un type de société ou l’humanité toute entière trouve sa cohésion et gère « en bon père de famille », l’ensemble de la planète
Que souhaitons nous ?
Comme nous le constaterons ci-dessous, c’est une utopie techniquement réalisable, mais mentalement impossible car nous avons des difficultés à abandonner nos repères habituels
Quatre questions essentielles pour le devenir de l’humanité
1/ – Population : Combien d’hommes et avec quel niveau de vie, la planète peut-elle admettre sans mettre en cause les équilibres naturels ?
2/ – Moyens d’existence : Comment permettre à chaque individu de se nourrir d’être protégé soigné, éduqué tout au long de sa vie ?
3/ – Sécurité : Comment assurer la sécurité collective et individuelle ?
4/ – Environnement : Comment laisser à nos successeurs une planète non épuisée ou dégradée ?
Que pouvons nous ?
Voici les réponses que j’entrevois au plan « technique »
Gouvernance mondiale
Confier à un gouvernement mondial, (émanant d’une ONU complètement redéfinie) les grandes orientations qui s’imposent désormais à l’humanité.
Ce gouvernement disposerait de deux atouts majeurs : d’une monnaie unique ( rien à voir avec ce que l’on connaît actuellement), et d’une armée mondiale, constituée de l’ensemble des armées nationales ; (soustraites à l’autorité des gouvernements nationaux).
Il serait le garant des « droits de l’humanité », des « droits de l’homme », et du « droit au travail pour tous ».
(Prévoir une organisation de ce pouvoir excluant toute possibilité de dérive dictatoriale).
Les notions de pays, et de nations ne seraient nullement remises en cause Par contre les régimes seraient obligatoirement des démocraties.
1 / – Population
Nous savons calculer la population globale admissible en fonction des ressources planétaires et du niveau de vie
Par exemple actuellement (1,2 milliards d’habitants peuvent vivre comme un américain moyen, ou 33,6 milliards comme dans les pays les plus pauvres)
Nous sommes 7 milliards d’hommes sur terre et ce chiffre s’accroît environ d’un milliard tous les douze ans. Une politique contraignante de limitation des naissances permettrait de réguler ce « paramètre » en posant comme donnée fondamentale qu’il est préférable d’éviter une naissance que de tuer un être humain par la sélection naturelle, la misère ou la guerre.
Il pourrait même être envisagé de revenir à une population mondiale de l’ordre de 4 milliards dans deux ou trois siècles
Limiter les naissances : on sait faire
2 / – Moyens d’existence
Je vais essayer de préciser ma pensée de façon caricaturale, car je ne suis pas un spécialiste et le domaine est trop vaste.
Ce que chacun peut constater c’est qu’une activité permet de dégager de la richesse, mais implique salaires, investissements, frais de fonctionnement dividendes et impôts, au sens large du terme).
On se rend compte que nos états modernes sont de plus en plus impliqués en matière de fonction publique, d’infrastructures et de réduction des inégalités.
Tout le monde réclame de plus en plus de moyens. Or ces moyens proviennent soit de l’impôt soit de la dette.
Quelque soit le cas de figure, l’écart entre objectifs souhaitables et moyens disponibles ne peut que s’accroître. Celui qui prétendrait le contraire dans le système actuel se trompe ou nous trompe.
Il faut donc trouver autre chose :
L’idée, consiste en une sorte de synthèse entre communisme et capitalisme.
Le développement des techniques et plus particulièrement de la robotisation laisse de plus en plus de monde en dehors du circuit traditionnel du travail.
Parallèlement une quantité énorme de taches utiles, ne sont pas accomplies, car elles apparaissent contre-productives
Or, dans le droit de l’humanité doit figurer un droit au travail pour tous.
La solution consiste à concevoir une société à trois vitesses et un financement adapté :
1/ – On garde le schémas actuel du capitalisme, mais on supprime l’impôt (Inégalitaire, impopulaire et, cher à récupérer). (Voir ci-dessous comment cela est possible.)
2/ – On réorganise la fonction publique en tenant compte de son financement par la banque mondiale. (Voir chapitre suivant)
3/ – On crée un circuit social, chargé de procurer impérativement un emploi à tous ceux qui n’ont pu s’intégrer ou se maintenir dans les deux précédents circuits économiques.
Ce secteur est également financé par la banque mondiale dans le cadre du budget préparé par chaque état et accepté par le gouvernement mondial.
Les tâches susceptibles d’être réalisées dans ce troisième circuit sont innombrables, en voici quelques exemples : (surveillance et soins aux personnes âgées, aux enfants, aux infirmes, amélioration du cadre de vie dans un quartier, une ville, un pays, entretien des forêts, reboisement, formation des adultes, lutte contre la désertification, soutien scolaire, actions citoyennes, etc., etc.)
Des critères de rentabilité doivent être pris en compte dans ce troisième secteur afin que tout salaire versé corresponde à un travail effectif, utile et de qualité. Les négligences sont sanctionnées par une mise à pied temporaire et sans salaire.
Tout travail procurant un pouvoir d’achat, le secteur concurrentiel s’en trouve dynamisé.
Concrètement : les salaires sont plus attractifs dans les deux premiers circuits que dans le troisième. Chacun trouve néanmoins, un emploi correspondant à ses mérites et motivations et peut passer d’un secteur à l’autre.
Financement du secteur non concurrentiel
On pose comme objectif économique mondial, que dans le délai raisonnable d’un siècle, tous les états disposeront s’ils le souhaitent de moyens d’existence équivalents, en s’efforçant de niveler plutôt vers le haut que vers le bas.
Le gouvernement mondial a la maîtrise de la monnaie unique. Celle-ci ne peut donc s’apprécier ou, se déprécier par rapport à aucune autre. Il convient seulement de conserver un équilibre entre le montant global de la monnaie émise et le volume total des biens et services proposés. Cela est rendu possible grâce à un circuit court de la monnaie.
On ne thésaurise plus, puis que l’on est garanti de percevoir des revenus tout au long de son existence (droit au travail et à la retraite). La discrimination par l’argent disparaît. Seul, le train de vie distingue les plus productifs, et les plus créatifs. On peut envisager qu’une grille des rémunérations impose qu’aucun homme ne puisse percevoir un salaire ou revenu supérieur, par exemple, à 50 ou 100 fois le salaire minimum. La motivation reste cependant suffisante pour que le génie humain continue de s’affirmer.
Le montant des retraites est indexé sur le salaire moyen perçu au cours de la vie active.
La mendicité est interdite sauf éventuellement pour raison spirituelle. ( ?????)
Les handicapés perçoivent le salaire minimum s’ils ne peuvent travailler.
Les moyens financiers ne doivent pas provenir de l’impôt, ils sont simplement émis par la banque mondiale selon une planification et une modélisation à mettre sur pied. Ils se traduisent pour chaque pays par des droits de tirage équivalents au budget présenté par chaque état et accepté par l’autorité mondiale
L’argent émis doit couvrir tous les besoins de la fonction publique, les investissements publics, et le droit au travail pour tous, selon un taux de progression devant permettre une parité économique de tous les états à échéance d’un siècle.
En résumé, le gouvernement mondial édite de la monnaie qui lui permet de financer la fonction publique et de payer tous les travailleurs des secteurs : public et social. Une consommation normale s’effectue tout au long de l’année, consommation à laquelle doit s’adapter et répondre le secteur concurrentiel.
Il conviendra de prévoir un système de régulation pour « éponger » l’excèdent de monnaie qui aurait pu être émis par rapport aux biens et services disponibles .et éviter la reconstitution de très grosses fortunes ainsi qu’une inflation mondiale.
Ce n’est pas une mince affaire que de tenter de planifier et modéliser tout cela tant aux échelons nationaux qu’au niveau mondial. C’est donc un véritable défi à relever conjointement par les informaticiens les économistes new-look, et les industriels
Il semble difficile d’affirmer la possibilité ou l’impossibilité d’entamer une telle démarche au niveau mondial. Par contre la faisabilité pourrait être vérifiée en chargeant L’ONU de mettre en place un tel système dans une Ile réputée pauvre telle que Haïti et la République Dominicaine sa voisine mieux développée.
Du travail et des moyens d’existence pour tous : on peut faire !
3/ – Sécurité
– Sécurité collective
Il faut absolument retirer à tous les chefs d’état le droit et la possibilité de faire la guerre.
A cet effet toutes les armées sont placées sous l’autorité du gouvernement mondial. Chaque état fournit et entretient le contingent qui lui est assigné, mais celui-ci est cantonné, 50% sur le territoire national, 50% à l’étranger, afin d’échapper à toute tentative d’utilisation de l’armée nationale par les gouvernements locaux. Chaque état doit donc héberger sur son territoire en contre partie, une quantité équivalente de militaires étrangers.
L’armée mondiale intervient à l’initiative du gouvernement mondial pour régler toute velléité de conflit.
— Sécurité individuelle
Police et gendarmerie disposent également des moyens militaires (non utilisés en permanence), pour leur action de prévention ou de répression.
Les prisons sont réduites. (Elles n’ont pas prouvé leur efficacité) Toutefois, la société doit se protéger efficacement contre tous ceux qui l’agressent.
Les peines prévues par le code pénal, totalement révisé, sont de deux sortes :
– Travaux d’intérêt général pour les premiers délits mineurs, et les délinquants récupérables.
– Prison ou (cela va faire hurler) amputations physiques graduelles (au choix) pour les fautes graves et les récidivistes conformément au code pénal révisé, (à partir d’une phalange d’un doigt). La peine est exécutée en milieu hospitalier spécialisé. Le condamné retrouve immédiatement sa place dans la société et conserve son droit au travail, toutefois une période probatoire est exigée durant laquelle le délinquant est doté d’un bracelet électronique. Cette proposition à priori choquante paraît cependant plus humaine, mieux adaptée et plus dissuasive que les solutions actuelles.
Personnellement entre cinq ans de prison et l’amputation d’un doigt, je choisirais la seconde solution
Assurer la sécurité individuelle et collective : on sait faire
4 / -Environnement
Actuellement, la protection de l’environnement grève les prix de production, on fait donc semblant de prendre en compte ce problème, mais en réalité, il est largement marginalisé. Les océans se vident de leur faune, les puits de pétrole s’épuisent, les nappes phréatiques se dessèchent, les forêts disparaissent, la planète se réchauffe etc.
Le droit au travail et la monnaie unique permettent de traiter cette question au fond, et d’inverser la tendance à la dégradation. De très grands travaux peuvent être entrepris tels que reconstitution des forêts tropicales, arrêt de la désertification, reconquête progressive des déserts, recyclage systématique des matières premières, dépollution des sites, amélioration des paysages urbains, recherche d’énergies nouvelles :(fusion nucléaire, batteries pour stocker l’électricité des voitures), et non polluantes etc.
Protéger l’environnement on sait faire !
Utopie ou non ?
A priori, tout ceci procède du rêve et ne peut être suivi d’effet car les mentalités ne sont pas prêtes aux nécessaires adaptations
« Pouvoir » n’est pas « vouloir » !
On ne sait pas faire !
– Dégager un consensus
– Prévoir et organiser à moyen et long terme
– Changer d’échelles de valeurs
Avant de renoncer il serait bon, sous l’autorité de l’ONU, que chacune de ces suggestions soit soumise respectivement à des groupes de philosophes, de scientifiques, d’économistes, et de politiques d’horizons différents, en leur demandant :
D’en faire une critique comparative et constructive par rapport à la situation actuelle
De vérifier leur cohérence et leur faisabilité
En cas d’adhésion significative à ces principes, il leur appartiendrait également d’échafauder un calendrier sur une quarantaine d’années pour la préparation et la mise en œuvre toujours sous l’égide de l’ONU.
Mais là encore nous sommes en pleine utopie, car :
L’ONU ne peut être mandatée que par des gouvernements
Or, aucun gouvernement ne cautionnera, une future amputation de ses prérogatives sur les deux pôles du pouvoir que sont l’armée et la monnaie.
Si une action doit se dessiner, pacifiquement elle ne peut démarrer que de la base, organisée en associations : locales, nationales, internationales. Il est certain qu’un foisonnement d’idées pourrait en sortir via Internet, prouvant que d’autres choix sont possibles essentiels et urgents.
Lorsque les médias s’empareront à leur tour du sujet, les responsables politiques aiguillonnés par leur base seront enfin contraints de s’occuper des vrais problèmes de l’humanité.
Michel Odinot
odinot.michel@neuf.fr
PS : Le contenu de ce texte peut, sans autre accord, être modifié et utilisé par tous ceux qui s’intéressent au sujet et souhaitent l’améliorer ou le prendre à leur compte.